Je te vois, je te regarde, je m’approche parfois mais je t’effraie alors je reste éloigné. J’aimerai t’accompagner plus souvent mais, je le sens, je suis pour toi encore comme un être de cauchemar. Pourtant, tu m’appelles régulièrement, je suis aussi pour toi une frayeur qui te sort de ta torpeur. Je suis un éveilleur à la vie, une menace lorsque tout est joué mais jamais un exécuteur. Pour tout être en symbiose aquatique, je suis énigmatique, sortant sans bruit des profondeurs de vos peurs, je vous réveille en sueur avec un regain d’envie de la vie. Je suis profilé, tel une épée, pour fendre les bleus émotionnels, pour y amener un regard capteur plus que voyeur. Je n’apporte pas la vision, je me confonds dans les liquides profonds. Je vous amène à dissocier voir et sentir la vie.
Dans ces rencontres éberluées, ce que vous ne sentez point est que, cette sorte de danger que vous ressentez, est pleinement partagé. Je suis en mode furtif pour, en définitif, apporter du substantif, je suis un être extra-sensitif. Pour ceux d’entre vous qui partagent notre sillage, l’instant est effervescent, une rencontre en curiosité émerveillée et partagée. Nous nous laissons approcher jusqu’à être touchés, nous vous montrons à quel point nous sommes bons, loin de ces faux noms que vous nous accordez, sans être pour le moins fâchés.
Je suis de ceux qui sont loin de lieux que vous expérimentez, je serais plus proche de vos croyances éloignées, de vos pré-histoires. Alors, mon aspect n’en ai pas moins profilé pour être non détecté et ainsi accomplir la vie. Je suis de cette lumière qui ne se voit qu’en dernier recours, un secours, un gardien, tel est mon chemin. Je suis dans les plus grandes profondeurs jamais naviguées par vous, voire même ignorées. Vous avez détourné vos regards de certains noirs pour vous permettre de croire que tout cela n’était qu’un passé effacé et, par là même occasion, vous permettre de vous occulter certaines peurs passées. Nous ne sommes pas des illusions, ni même une menace sous-marine, nous sommes dans des lieux et à des lieux de vos perceptions, pour que votre choix soit respecté. Nous avons séjourné plus en proximité avec régularité, nous sommes en association d’existences, parfois jouant les messagers.
Tu me vois dans ces profondeurs illuminées comme surréelles et pourtant vraies, mon monde se fond dans cette clarté comme phosphorée, luminescente. Ma probable apparence de staticité cache ma formidable dynamicité tout en élasticité. Je suis tout en impulsions calmes et tranquilles, je me confonds avec le fond, en apparence immobile je sers d’écran radar pour, comme mon être l’est, cacher ce pullulement profondément éloigné de ce que vous regardez, ou acceptez de considérer.
Et je suis là, parfois près de toi, mais pas trop, pour respecter ce côté effarouché auquel tu sembles t’accrocher malgré mon amitié primitive que tu connais, au-delà de mon et ton aspect qui sont un lointain et proche air de nos corporalités. Je chéris ma forme, elle me mène dans les différentes irrégularités de mon décor de vie. Je sens l’aversion que tu ressens pour ta corporalité, tu l’as aimée au point de la modeler, mais le souvenir de cette modularité est quelque peu effacé dans ta vision de la composition dans laquelle tu es en immersion. Je puis t’apporter stabilité dans les flots ballotés de l’existence que tu choisis de mener et, ainsi, te permettre d’être plus en apparence de dormance lorsque ce magma de confusion d’émotions se présente jusqu’à presque briser la surface. Je peux te bercer de mon regard de douceur infinie qui salue ce miroir de vie. À bientôt, dans ce noir qui ne t’a jamais effrayé, du plus loin que tu remontes dans cette mémoire. Nous aimons ces lumières sombres, elles nous permettent de briller plus fort dans le noir.
Canalisation reçue d’une vie de Mégalodon
samedi 23 janvier 2021 – Villa Silva